De Liloupop à Lilou Black... lunatisme ou lycanthropie?

quand le futur nous colle au train

--> Liloupop se projette dans un avenir de rêve...

Juin 2008, au café Reflet, rue Champollion, 75005, Paris. Liloupop a retrouvé par hasard une fille qu'elle a connu et détestée il y a plus de dix ans, déjà. En fait, elle l'a rencontrée pour la première fois sur les bancs du collège seize années auparavant. C'est sa belle-sœur qui a retrouvé cette fille, que nous appellerons Magda (pas envie de dévoiler son vrai nom). Soso d'amour a tourné définitivement la page de la dépression, mieux, elle travaille comme bénévole dans une association qui aide ceux qui ont essayé de se suicider. Ce qui a été le cas de Magda. Soso d'amour et Magda ont sympathisé, et Liloupop a accepté de prendre un café avec Magda. Pour voir.

Liloupop est assise à une petite table, dans le fond du café. Elle n'a encore rien commandé. Arrive Magda. Liloupop la reconnaît sans peine. Toujours les mêmes cheveux blond-roux, longs, tombant librement sur ses épaules. Les mêmes yeux un peu globuleux, et la même petite bouche en cul de poule. Mais Magda est osseuse. Elle porte une longue robe noire qui accentue sa maigreur, et elle serre contre elle un sac à main en cuir marron râpé. Elle regarde Liloupop d'un air vaguement étonné, parce que Liloupop ne ressemble plus à cette adolescente boutonneuse et mal fagottée qu'elle a connu jadis. Les deux femmes se sourient, et Liloupop se lève pour embrasser Magda:

Liloupop: Salut, Magda!
Magda: Salut! Dis donc, je ne t'aurais pas reconnue. Ça te va bien, les cheveux courts.
— Ça fait six ans qu'ils sont comme ça. Je peux t'assurer que je ne porterai plus jamais de natte.
— C'était pourtant ta marque de fabrique quand on était au collège.
— M'en parle pas.
— Faut dire qu'à l'époque, on n'a pas été cool avec toi.
— C'est rien de le dire.
— C'est ta belle-sœur à l'association qui m'en a parlé. On savait pas qu'on t'avait fait autant de mal. On était des petites garces méchantes.
— Mmmmmm...

Arrive le serveur. Magda commande un thé, Liloupop du Coca. Il va chercher les boissons.

Magda: Eh, j'ai lu ton bouquin. Il est pas mauvais, dis donc. Tu écris toujours plutôt bien.
Liloupop: Toujours?
— Ben oui, c'était pas mal ce que tu écrivais, au collège.
— Mmmmmm... Toi, je me rappelle quand tu t'étais essayée au roman érotique.
— C'étaient mes hormones. Et puis bon, on était tous comme ça. Un peu obsédés, et puis à se casser les uns les autres. Toi, le cul, ça avait pas l'air de t'intéresser. Ça te débectait plutôt, non?
— Je ne dirais pas ça... Je préférais garder ça pour moi. Et puis j'étais vachement sentimentale.
— Ça je me rappelle. Tous ces gars après lesquels tu soupirais... Un tas de cons, ça va sans dire. À part Edgar, peut-être...
— Me reparle pas d'eux. Tu revois tout ce monde-là?
— De temps en temps... Audrey, Anne et Chloé sont venues me voir à l'hôpital quand j'ai fait ma connerie... Audrey a un mec italien. Elle vit là-bas la moitié de l'année. Anne et Chloé habitent ensemble, elles papillonnent de mec en mec... Et elles bossent ensemble dans un magazine de mode.
— Elles ont pas vraiment changé. Et toi non plus. Toujours derrière la vie sentimentale des gens.
— Eh ouais... Dis, ta belle-sœur m'a parlé de la tienne.
— Oh la peste, putain... (rires)
— C'est pour quand, le mariage?
— Septembre.
— Ah, sacrée Liloupop.
— ben oui. Vous ne donniez pas cher de mon avenir amoureux, au collège, et puis voilà que je vais me marier.
— Tu l'as connu comment?
— À la fac, y a longtemps. On a bossé ensemble, à un moment... Et puis on s'est revus, et puis voilà. On est ensemble depuis près de quatre ans.
— Sympa. Ma vie à moi, de ce côté-là, c'est pas terrible. Figure-toi qu'en fait, j'étais avec Matthieu.
— Du collège? C'est pas vrai!
— Ben si. Et non seulement il continue à se camer, mais en plus il me trompait tout le temps. C'était l'humiliation permanente avec lui. Il a pas tourné comme Jordan. Lui, c'est devenu quelqu'un de bien. Il est reparti aux States.

Liloupop sort un paquet de cigarettes de son sac. Elle en offre une à Magda. Elles fument en silence. Puis Magda rompt le silence.

— hé, Liloupop... Tu sais, je suis vraiment désolée de ce qui s'est passé au collège.
— Bah, je suis un peu responsable aussi, quelque part... J'ai jamais fait les efforts qui s'imposaient pour m'adapter.
— Ouais, mais... Bon, c'est vrai, on t'aimait pas vraiment, on te trouvait trop émotive, trop bizarre... Mais quand je te vois maintenant, putain... Tu es écrivain, t'as même écrit un vache de bon bouquin, tu as fait des études originales, et puis tu vas te marier... Je suppose que tu t'es battue pour en arriver là, et du coup, je pense qu'à l'époque, on aurait du essayer de mieux te connaître, et de mieux te comprendre, au lieu de juger à l'emporte-pièce...
— Laisse béton, Magda. Les gens sont cons quand ils ont treize ans. Ça change quand on grandit.
— Ouais mais... Regarde, moi. Je voulais être actrice. Putain, après le bac, je me suis plantée en prépa, j'ai fait des études de droit totalement merdique, j'ai eu un mal de chien à avoir le Capes d'histoire, et j'enseigne dans une boîte privée pleine de petits crétins arrogants. Je me fais chier, ma vie amoureuse ne vaut pas un clou, et rien que pour ça j'ai essayé de me foutre en l'air.
— Ça va, Magda. T'en fais pas. C'est passé. Peut-être que maintenant, tu auras des objectifs plus réalistes.

Liloupop regarde Magda. Ça lui fait bizarre de considérer cette petite peste arrogante qu'elle a connue, et qui est devenue une femme cassée et bourrelée de regrets. Elle est prête à pardonner, parce qu'elle a pris sa revanche sur la vie.

Ça fait du bien, parfois, de se projeter dans un avenir et de se l'imaginer tel que l'on voudrait qu'il soit...

Muf-muf.

La journée de demain s'annonce merdique.

Pondu par liloupop, le Jeudi 12 Février 2004, 22:24 dans la rubrique "exercices de style".

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